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Soc. 15 mai 2019 : L'appel par lettre recommandée, un casse-tête pour les justiciables et les professionnels

Le 22 juillet 2019
La Chambre sociale se prononce sur la possibilité de faire appel au moyen d'une lettre recommandée avec accusé de réception.

Par un arrêt du 15 mai 2019 (Soc. 15 mai 2019, F-P+B, n° 17-31.800), la Cour de cassation s’est prononcée sur la possibilité de faire appel au moyen d’une lettre recommandée avec avis de réception. La chambre sociale de la Cour de cassation affirme qu’au regard de l’article 930-1 du code de procédure civile, la remise au greffe signifie qu’il s’agit d’une remise matérielle et non d’un envoi par lettre recommandée avec avis de réception. 

 

En l’espèce, une société avait été condamnée au versement de plusieurs sommes d’argent à un salarié ayant contesté son licenciement auprès du conseil des prud’hommes. La société avait fait appel par l’intermédiaire de son avocat, lequel était inscrit dans un barreau extérieur à celui de la Cour d’appel.

 

Suite à une ordonnance du 6 mars 2017, la déclaration d’appel faite par lettre recommandée avait été considérée comme étant irrecevable par le conseiller de la mise en état. Cette décision avait été approuvée par la Cour. Pour les juges du fonds, la remise de la déclaration d’appel au greffe ne pouvait se faire au moyen d’un courrier recommandé.

 

La société a formé un pourvoi au sein duquel elle indique qu’il ne résulte pas de l’article 930-1 du Code de procédure civile qu’un envoi par lettre recommandée pour l’acte d’appel est exclu. Par conséquent, pour la société, la Cour d’appel a violé l’article 930-1 du même code, dans sa rédaction antérieure au décret du 6 mai 2017 ainsi que l’article 6, § 1, de la Convention européenne des droits de l’homme, ne permettant pas en outre de répondre aux objectifs de cohérence et de sécurité juridique, importants en matière prud’homale.

 

La chambre sociale de la Cour de cassation rejette le pourvoi. Cette solution est tout à fait logique dans la mesure où elle réaffirme ici sa solution du 5 décembre 2018 (Soc. 5 déc. 2018, nos 17-27.032, 17-27.033, 17-27.034 et 17-27.035, Dalloz jurisprudence) où les faits d’espèce étaient similaires. Ainsi, la chambre criminelle considère que c’est à bon droit que la Cour d’appel en a déduit que l’appel formé par la société était irrecevable en rappelant les termes de l’article 930-1, alinéa 2, du code de procédure civile.

 

Au regard des dispositions de cet article, dans leur rédaction antérieure au décret n° 2017-891 du 6 mai 2017, il ressort bien que la remise au greffe doit s’entendre nécessairement d’une remise matérielle excluant l’envoi sous forme de lettre recommandée avec avis de réception.

 

Selon la Cour de cassation, une telle approche ne méconnait pas le droit d’accès au juge et les exigences de l’article 6, § 1, de la Convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales.

 

Ainsi, à travers cette décision la chambre sociale fait une interprétation très stricte des textes. De cette façon, elle met fin aux divergences de jurisprudences relatives à l’interprétation de l’article 930-1 qui existaient entre diverses cours d’appel.

 

Il est vrai que les approches ont divergé au sein de la Cour d’appel de Paris. Une des chambres considérait par exemple que la déclaration d’appel qui n’était pas faite par voie électronique en raison du fait que l’avocat non parisien la formulant n’était pas relié au RPVA est irrecevable. Il a été considéré que, connaissant sa situation, cet avocat aurait dû demander à l’un de ses confrères ayant cette faculté de le faire à sa place.

 

Inversement, une autre chambre considérait que le fait pour un avocat inscrit au barreau du Val d’Oise de faire appel devant la Cour d’appel de Paris alors qu’il n’a pas accès au RPVA en raison du fait qu’il n’est pas rattaché au ressort géographique de cette cour, et donc pour des raisons techniques ne lui étant pas imputables, constitue une cause étrangère au regard de l’article 930-1 du code de procédure civile.

 

En matière prudhommale il y a une dualité d’intervention de l’avocat et du défenseur syndical. En raison de cette dualité en l’espèce, la Cour de cassation a indiqué qu’un avocat hors ressort de la cour d’appel pouvait faire appel malgré le fait qu’il soit inscrit dans un barreau d’un autre ressort. La Cour de cassation a ainsi écarté les règles de postulation.

 

La Cour d’appel de Poitiers avait pour sa part considéré qu’à la lecture même de l’article 930-1 du code de procédure civile, la déclaration d’appel devait être remise par voie manuelle au greffe de la cour et non par lettre recommandée puisque après apposition du visa du greffe, un exemplaire était remis immédiatement à l’avocat, ce qui était exclu si l’appel avait été effectué par recommandé.

 

En outre, la Cour avait relevé que le décret du 6 mai 2017, entrant en vigueur le 1er septembre, soit postérieurement à la déclaration d’appel, envisageait bien la possibilité de faire appel par lettre recommandée, ce qui signifiait donc que cela n’était pas possible antérieurement.

 

De plus, l’intervention d’un avocat hors ressort pose également des difficultés, cette intervention étant liée à la dualité d’intervention de l’avocat et du défenseur syndical. Cela pose des difficultés bien évidemment quant à la question de la territorialité, mais cela pose aussi des difficultés pour invoquer une cause extérieure lorsque cet avocat n’a pas fait appel à un confrère rattaché à la cour d’appel concernée. Il y a également des difficultés quant aux dates à prendre en considération afin de permettre l’envois ou les remises d’actes. Si l’avocat hors ressort va souvent utiliser l’envoi par mail ou la lettre recommandée afin de notifier ses conclusions à son confrère, l’emploi de la lettre recommandé n’est possible envers une juridiction que dans l’hypothèse d’une cause étrangère ou entre avocat et défenseur syndical comme le prévoit les articles 930-1 et 930-3 du code de procédure civile. L’autre difficulté est que la notification d’actes entre les avocats est soumise à des règles différentes que l’on retrouve dans le code de procédure civile. Ainsi une telle notification peut se faire par le biais d’une notification RPVA, d’un acte d’huissier prévu à l’article 672 du code de procédure civile et enfin la remise directe en double exemplaire au regard de l’article 673 du même code. Si tous ces modes de notifications ne sont pas respectés, la déclaration d’appel est caduque ou alors les conclusions sont irrecevables.

 

Par conséquent, cet arrêt témoigne du fait que les risques en matière procédurale sont multipliés devant la Cour d’appel.  Le Décret Magendie était déjà compliqué, le fait qu’on souhaite maintenir également une double intervention entre l’avocat et le défenseur complique encore plus les choses et met en péril les droits des citoyens devant les juridictions.

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