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Zoom sur la loi de programmation et de réforme pour la justice : la détention à domicile sous surveillance électronique

Le 20 mai 2019
La loi de programmation et de réforme pour la justice a créé la possibilité de prononcer une peine de détention à domicile sous surveillance électronique, peine qui peut s'avérer clémente par certains aspects et plus contraignante par d'autres.

Un an après la publication de la loi du 23 mars 2019 de programmation et de réforme pour la justice sera mise en place une nouvelle peine: "la détention à domicile".

Cette peine, qui pourra être appliquée en matière correctionnelle, est le pendant du placement sous bracelet électronique, mesure d'aménagement de peine et de contrôle judiciaire, et viendra remplacer la contrainte pénale, qui elle-même sera supprimée au profit du "sursis probatoire". 

Actuellement, le placement sous surveillance (PSE) électronique était une des modalités possibles et prévues pour le contrôle judiciaire de personnes prévenues ou mise en examen, ou encore une mesure d'aménagement d'une peine d'emprisonnement.

La peine de détention à domicile sera inscrite dans la liste des peines prévues par l'article 131-1 du Code pénal avec pour objectif d'inciter les juridictions à prononcer ce type de peine. Cette peine pourra être prononcée pour un minimum de 15 jours et un maximum de 6 mois. 

A la différence de la contrainte pénale, les juridictions n'auront pas à prononcer une peine d'emprisonnement en plus de la mesure (pour la contrainte pénale actuelle, le juge doit prononcer une peine de prison de 2 ans maximum), peine que la personne condamnée devra effectuer en cas de non respect de ses obligations et/ou interdictions. Dans le cas de la détention à domicile, l'inobservation de la mesure entrainera pour le condamné un emprisonnement pour le reste de la peine restant à effectuer (nécessairement 6 mois maximum ; pour la contrainte pénale, la durée était prévue entre 6 mois et 5 ans).

Le futur article 132-25 du Code pénal prévoira le prononcé obligatoire de la mesure de détention à domicile sous surveillance électronique, de la semi-liberté ou de placement à l'extérieur pour :

- toute condamnation à une peine inférieure ou égale à 6 mois d'emprisonnement ou

- une peine de prison partiellement assorti du sursis avec une partie ferme inférieure ou égale à 6 mois, ou

- une peine pour laquelle la durée d'emprisonnement restant à exécuter (lorsqu'il y a eu détention provisoire) est inférieure ou égale à 6 mois.

En l'état des dispositions actuelles, rien n'obligeait les juridictions à prononcer une peine de contrainte pénale ou de surveillance électronique en lieu et place d'une peine d'emprisonnement. 

L'actuel article 132-26-1 du Code pénal prévoit la possibilité concernant les peines d'emprisonnements prononcées pour une durée inférieure ou égale à 2 ans d'exécuter ces peines sous le régime du placement sous surveillance électronique, à la condition que la personne condamnée justifie d'une raison sérieuse :

- soit son activité professionnelle

- soit la nécessité de suivre un traitement médical

- soit sa nécessaire participation au quotidien de sa famille

- soit encore à l'existence d'efforts sérieux de réadaptation sociale.

Le futur article 131-4-1 du Code pénal ne reprendra pas, dans les cas où son prononcé est facultatif, cette condition de justifier d'une raison particulière, même si la mesure devra être motivée, obligation applicable au prononcé de toute peine. 

En permettant ou obligeant selon les cas le juge à prononcer ce type de mesure, l'un des objectifs est de lutter contre la surpopulation carcérale en évitant l'emprisonnement, ce qui s'apparente comme une mesure clémente. 

Au 1er avril 2019, la population carcérale atteignait les 71 828 personnes détenues, en constante augmentation depuis 2011, pour 59 459 places, soit un taux de remplissage à 117% (140% dans les maisons d'arrêt, utilisées pour les courtes peines et les détentions provisoires). 

Toutefois, la détention à domicile peut être également considérée comme contraignante, ayant été pensée comme une mesure d'accompagnement socio-éducatif individualisé et soutenu, avec des obligations et interdictions pour le condamné, qui pourront s'accompagner de mesures d'aides (prévues à l'article 132-46 du Code pénal et étant déjà en vigueur concernant la contrainte pénale).

En outre, la possibilité d'aménagement de peine est réduite lorsque la peine de détention à domicile est prononcée. En effet, les aménagements de peine (surveillance électronique, placement à l'extérieur, semi-liberté) peuvent être prononcés pour des condamnations à des peines de prison inférieures ou égales à deux ans. 

Ainsi, la loi de programmation permet de mettre fin au prononcé de très courtes peines d'emprisonnement (obligation de prononcer la détention à domicile pour les peines inférieures ou égales à six mois + interdiction des peines inférieures à un mois) tout en donnant davantage de vigueur aux peines comprises entre un an et deux ans de prison : l'aménagement restera possible par le juge d'application des peines. 

Dans le cadre de la détention à domicile sous surveillance électronique, le condamné pourra s'absenter de son domicile, mais uniquement pour exercer une activité professionnelle, suivre un traitement médical ou un projet d'insertion, ou participer à la vie familiale.

En cas de non respect de la mesure, le juge d'application des peines pourra ordonner l'emprisonnement de la personne pour la durée restant à exécuter, ou limiter ses autorisations de sortie.